Il était une fois… l’histoire (classes 6 à 8)

DANS LA   PREMIERE   PARTIE DE   CET ARTICLE PARU DANS LE NUMÉRO PRÉCÉDENT DE LA REVUE  DE l’APAPS,  IL  A ÉTÉ QUESTION DES DIFFÉRENTS ÉTATS DE  CONSCIENCE QUE TOUT ENFANT EST AMENÉ À TRAVERSER ET À VIVRE AU  COURS DE SON DÉVELOPPEMENT,  PARTICULIEREMENT CEUX EN LIEN AVEC LA   PÉRIODE DE  SEPT À ONZE ANS, ET DE LA MANIERE DONT L’HISTOIRE EST ENSEIGNÉE À CES AGES. LE  PRÉSENT ARTICLE CHERCHE À   DÉCRIRE LA CONSCIENCE DES JEUNES AGÉS DE 12 À 14 ANS, À TENTER UNE FORMULATION DES QUESTIONS QU’ILS SONT AMENÉS À SE POSER,  À PRÉSENTER,  ENFIN,  COMMENT L’HISTOIRE TELLE QU’ELLE EST ENSEIGNÉE DANS LES ÉCOLES APPLIQUANT LA PÉDAGOGIE STEINER PEUT APPORTER DES ÉLÉMENTS DE RÉPONSE, OU TOUT AU MOINS DE RÉFLEXION.

(C) Madmagz
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L'adolescence, le grand chamboulement !

A partir de douze, treize ans, l’enfant aborde une étape primordiale de son évolution, un moment unique même, c’est celui appelé : l’adolescence. Pendant sa durée, soit deux ou trois années, voire même plus, le pré-adolescent est appelé à vivre progressivement un processus de mort et simultanément un processus de naissance. Mort de son enfance d’une part, naissance de ce qui fera de lui, plus tard, un adulte d’autre part. Ces deux phénomènes se rencontrent à ces âges. C’est exceptionnel.

Tel un randonneur qui, lorsqu’il atteint un pic ou un col élevé, peut englober du même regard les deux versants de la montagne, le pré-adolescent perçoit avec une acuité particulière son passé et son futur tout à la fois. C’est un moment de vertige, de doute, de crise… Assister au crépuscule de son enfance, à son irrémédiable déclin tout en contemplant l’aurore naissante de son individualité, de son « moi », n’est pas, on s’en doute, un spectacle banal. En effet, il lui faut faire le deuil de tout ce qu’il a connu et aimé jusque-là et s’ouvrir à un monde nouveau, encore étranger, celui des adultes qu’il commence à découvrir. Accepter, de surcroit, de laisser grandir en lui ce « moi » nouveau qui prétend dorénavant agir progressivement en maître, diriger la « maison »! Quelle situation ubuesque !  Quel bouleversement ! Quelle remise en question de toutes les valeurs acquises, de tous les repères connus. Le désarroi qu’il ressent est compréhensible. Aucune fuite ne lui est autorisée. Les portes de l’enfance se ferment irrémédiablement, celles du futur, de l’inconnu, seules sont ouvertes. Quel dilemme !

Cette étape n’est pas anodine. Elle préfigure les formidables chamboulements qui, au fil des années, vont métamorphoser l’enfant qu’il est encore un peu, en l’adolescent puis l’adulte, femme ou homme qu’il va devenir. Cette phase met, peu ou prou, un point d’orgue à son évolution d’enfant, impulse la reconfiguration physique et psychique totale, qu’exige et qu’orchestre le « moi » en devenir, ce nouveau maître des lieux. Tout en effet doit être transformé, reconstruit, agrandi, recalibré. Le « moi » l’exige. Tout doit être à son image.

Jusque-là, l’enfant a grandi sous l’autorité de ses parents  et de ses professeurs. Avec confiance il s’y est configuré. A douze ans tout change. Le « moi » en prenant la relève se manifestera toujours. C’est lui qui, dorénavant, impulsera avec de plus en plus de force ses choix, ses critères, ses exigences.

Le « moi » a besoin de clarté, d’exactitude, de repères fermes pour s’ouvrir au monde, pour agir efficacement. Pour cela, il lui faut des outils à même de l’aider, des outils nouveaux encore peu affutés chez l’enfant de douze ans. Ils ont pour noms le penser, la logique, l’observation exacte, l’analyse, l’abstraction… Leur acquisition devient sa priorité. A cet âge, l’adolescent ne veut plus croire le monde mais le comprendre, le penser. Il veut observer, expérimenter, juger, penser par lui-même. C’est son nouveau défi. Il pressent que leur acquisition formera le socle de son émancipation future.

 

Que toute réelle autonomie ne s’appuie désormais que sur elle. Tel est le challenge qui se présente à lui. Tel est le chemin qu’il doit parcourir. Sentier ascendant, rude, difficile, escarpé? C’est là, entre parois et précipices qu’il lui faut exercer ses sens, forger, affûter ses outils de connaissance.

Pour effectuer ce périple, il lui faut aussi s’équiper. À cette fin, il va grandir, se fortifier. Parfois très vite. C’est l’âge où sa garde-robe doit être renouvelée tous les six mois… où sa démarche devient maladroite tant ses membres sont devenus longs, lourds, disharmonieux.

Outre cette croissance accélérée il se revêt d’une nouvelle peau, une sorte d’imperméable à même de l’isoler de tout ce qui vient de l’extérieur, de protéger ce qui veut grandir en lui, c’est-à-dire son intériorité nouvelle, son individualité. C’est la raison pour laquelle l’adolescent semble fermé, replié sur lui-même, enfoui sous son capuchon ou caché derrière la mèche de ses cheveux. Il cherche à préserver, à structurer, à identifier son espace intérieur.

Dorénavant deux mondes s’opposent en lui. C’est un fait nouveau. Le monde extérieur et le monde intérieur. Chacun a sa logique, ses lois, ses exigences. Le premier incarné par les adultes et la société, sage et prévenant, est soucieux de ses études et de son avenir ; le second, animé par son tout jeune « moi » est impulsif, irréfléchi, inexpérimenté, avide de vécus et de découvertes. Cela provoque un dilemme, un conflit. Qui écouter ? Qui suivre ? Les conseils des adultes ?  Être sage ? Se révolter ?… Comment choisir ? C’est la crise de l’adolescence et avec elle, son cortège de doutes, d’hésitations, de souffrances, de hauts et de bas, de rires et de pleurs, d’élans généreux et de repli sur soi, de confiance et de découragement…

Parallèlement à ces états d’âme, le jeune découvre la nature de son moi, de cette « chose en lui » dont il ressent qu’elle est le centre de son être, le noyau intemporel, l’étincelle divine. Il découvre qu’elle aussi obéit à une double réalité. Qu’elle aussi a un « dedans » et un « dehors ». Qu’elle aussi se meut dans deux réalités et possède deux langages. L‘une exprime tout ce qui se rattache aux notions de ce que nous pouvons nommer l’ »Être », l’autre à ce que nous pouvons nommer l’ »Avoir ». La première est porteuse d’idéaux nobles, de générosité, de vérités éternelles, d’altruisme… La seconde est épendante des besoins du corps, du paraître égocentrique…

L’adolescent vit intensément cette contradiction. Elle le met dans l’embarras tout en aiguisant son regard sur le comportement des adultes, de la société en général, qu’il jugera dorénavant par lui-même, parfois à l’ »emporte-pièce », sans compromis. Ces jugements révèlent la nature encore hésitante de son « moi ». Il devra, petit à petit, composer avec elle, trouver le nécessaire équilibre qui fondera sa personnalité. Ce sera une tâche ardue, ponctuée d’élans de générosité, de don de soi, d’attitudes tyranniques et égocentriques aussi. La responsabilité des adultes est alors primordiale. D’elle dépend l’issue de ce « combat intérieur » aux enjeux si déterminants pour son avenir. Les maîtres mots sont : confiance, dialogue, intérêt, lâcher prise… Ils permettent de maintenir le lien indispensable, de tisser ne relation nouvelle avec le jeune, une relation respectueuse basée sur la confiance et la compréhension mutuelle. C’est ce qu’il attend précisément d’eux.

(C) NASA
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Une réponse aux questions existentielles

De l’adulte, le pré-adolescent attend également des réponses claires aux doutes et questions qui l’assaillent. Il réclame des explications, des éclaircissements, des exemples de

vie aussi. Ces questionnements sont d’ordre existentiel pour lui. Les ignorer, ne pas les entendre ou plus simplement, ne pas savoir ou pouvoir y répondre, peut avoir de lourdes conséquences sur son évolution, voire sur sa destinée même.

La question essentielle que se pose tout adolescent est celle touchant à son identité, au fameux « qui suis-je ? ». Elle entraîne dans son sillage toutes celles en lien avec la finalité de l’existence, avec le non moins fameux « Pourquoi vivre ? » ou  » la vie a-t-elle un sens, un but ? », sur les notions de « liberté » et d’ »amour » enfin.

Outre les réponses qu’il trouvera dans ses lectures et dans son environnement, l’école a pour tâche, de par ses contenus, de lui en offrir quelques-unes. Ainsi l’ »histoire », telle qu’elle est enseignée dans les écoles appliquant la pédagogie Rudolf Steiner-Waldorf, se donne pour but d’étudier dans le détail les civilisations ou périodes historiques correspondant à son éveil psychologique et à ses attentes.
C’est ainsi qu’à la grave question du  « qui suis-je ? » que tout pré-adolescent de douze ans (sixième classe) commence à se poser, il est répondu par l’étude de la Rome antique d’une part et par celle du Moyen-âge d’autre part.
Chacune à sa façon, ces deux grandes périodes historiques ont vu des peuples œuvrer dans le sens de l’individualisation, ont vu l’homme s’approprier petit à petit son identité personnelle, son « moi ». Avant la fondation de Rome (744 av. J-C) les peuples étaient encore soumis à l’autorité divine incarnée par les Rois-prêtres. Les notions de liberté, de droits individuels n’existaient pas encore. Tout était absolu, intransigeant, de droit divin. Le peuple s’y configurait sans songer à se révolter. Un peu comme des enfants face à l’autorité naturelle des parents. Personne n’imaginait « mettre en question » les volontés divines, les sages lois éternelles. 

Rome et le développement du moi

Avec Rome naît un nouvel état de conscience, celui de la conscience individuelle. Celle-ci, impulsée par son fondateur Romulus, s’imposera toujours plus au cours des siècles et verra chaque citoyen romain conscient de son moi, de sa personnalité. Un moi soucieux d’autonomie, de liberté refusant l’arbitraire, avide de reconnaissance. La naissance de la République en est la conséquence. Avec elle naît une vie politique qui tient compte de la volonté d’individus conscients de leur « ego », des droits qu’ils réclament pour se développer et s’affirmer. Pendant des siècles le Sénat va affiner le droit romain, développer la République dans le sens  d’une représentativité toujours plus populaire, asseoir une équité plus juste entre tous les citoyens romains.

(C) Wikipedia
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Parallèlement à cette évolution démocratique, Rome va développer une sensibilité exacerbée pour tout ce qui est en lien avec les notions de propriété privée d’une part et pour son corrélatif, à savoir le « droit écrit ». Pour cela des frontières ou limites clairement définies seront établies. Frontières entre le privé et le collectif, entre ce qui est romain ou non romain, c’est-à-dire barbare (étranger). Ces limites omniprésentes à Rome manifestent la conscience d’un dedans et d’un dehors, d’un subjectif et d’un objectif… Elle permet au « moi » naissant de s’approprier un espace privé où il peut se développer, se structurer sur des bases personnelles clairement définies. Songeons un instant au fameux « mur romain », véritable fortification qui protégeait l’Empire de l’Angleterre jusqu’à la mer Noire, aux cultes et aux cérémonies qu’il lui vouait et nous comprenons ce qu’une frontière pouvait représenter pour tout romain. À quel point elle lui était existentielle.
C’est dans ce contexte que l’ »ego » a pu se développer, s’affirmer, naître à lui-même.
Ambitieux, avide de pouvoir, de richesses, de plaisirs et de reconnaissances, il a vite délaissé l’ancien et sage monde des dieux pour s’adonner à une existence basée sur la seule satisfaction personnelle, à sombrer enfin dans l’ambition et l’égocentrisme délirants incarnées par les empereurs « fous » du début de notre ère. Ces derniers en sont même venus à faire décapiter les vénérables têtes des dieux des statues du Capitole afin d’y placer des copies de leur propre visage… !  Révélant par là-même, leur orgueil délirant. Car leur ambition, après celle de l’argent, du pouvoir et des plaisirs les plus raffinés, visait à devenir l’égal des dieux.
L’étude de la Rome antique révèle au pré-adolescent les conséquences que peut avoir un « moi » adonné uniquement à lui-même, à son égocentricité. Il en mesure les effets pervers et illusoires.

(C) Wikipedia
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Moyen-âge et altruisme

Le Moyen-âge, présenté dans ce qu’il possède de plus élevé, de plus spirituel, dans sa quête d’un christianisme absolu apporte une contre-image à la Rome boulimique. À l’avidité insatiable de cette dernière, il répond par la générosité, le don de soi, à son égocentrisme par l’altruisme, à sa quête de conquêtes terrestres par l’élévation intérieure, à l’ambition personnelle par le don de soi-même…

Quelle polarité ! Quelle radicale opposition ! Qu’y a-t-il de commun entre un centurion romain et un chevalier templier ? Le premier combat avant tout pour sa solde, son avancement, la cité, le second au service de Dieu, offre son adresse, sa force, sa protection aux pèlerins, aux faibles, aux démunis…  Entre le Capitole où s’alignent pêle-mêle toutes les divinités de l’Empire romain et l’édification d’une cathédrale gothique, sublime manifestation de la foi chrétienne ?  

Entre les frasques décadentes des prêtres du bas empire et l’abnégation d’un moine copiste… Entre une société où la religion n’est plus qu’un instrument de domination politique et celle pétrie d’idéaux chevaleresques et courtois de la noblesse du XIIème siècle ? Entre la rationalité matérialiste romaine et l’élan idéaliste et spirituel du Moyen-âge…? Les premiers manifestent l’égocentrisme du moi, sa soif insatiable de richesse et de pouvoir, les seconds l’élévation intérieure, la recherche de vérités éternelles.
La mise en valeur de ces deux grandes périodes historiques, outre les hauts faits qui les rythment, leurs ambiances spécifiques, les grands hommes qui les ont portées, révèle la double réalité du « MOI ». Le pré-adolescent peut alors ressentir leur spécificité, comprendre leurs finalités, mesurer les conséquences qu’elles génèrent sur autrui et sur lui-même. Ces vécus grandiront en lui, formeront progressivement l’indispensable socle que requiert son développement intérieur. Conscient de ces réalités il sera capable de trouver l’équilibre que réclame l’individu qu’il veut édifier, d’assumer son intégration sociale aussi.
Aux brûlantes questions sur la liberté, l’amour, l’injustice de la société, l’égoïsme des hommes, qui secouent tout adolescent, la révolution française et ses idéaux de « liberté-égalité-fraternité », d’une part, la déclaration des droits de l’homme, d’autre part, peuvent apporter des éléments de réponses.

Révolution et idéal

À l’écoute de ces évènements historiques si extraordinaires, de ce gigantesque retournement des consciences qui secoua la France à la fin du XVIIIème siècle et qui provoqua un tel bouleversement de société, qui à terme, donna naissance à un monde si radicalement nouveau, l’adolescent ne peut rester indifférent. Au contraire ils l’enthousiasment, le font vibrer de la tête aux pieds ! Tous les idéaux, ceux justement qui vivaient si profondément en lui, ont pu être imposés il y a plus de deux siècles par la ferme et déterminante volonté d’une poignée de parisiens et parisiennes ! L’immuable société des puissants, dominée par des monarques absolus, soutenue par une église dogmatique, a pu être renversée par quelques citoyens convaincus !

(C) Factus Scribo
(C) Factus Scribo

Changer, métamorphoser même, un royaume séculaire, arbitraire et égoïste en une république respectueuse des petites gens, égalitaire et solidaire, voilà de quoi faire sortir de sa torpeur tout adolescent ! Il réalise qu’un futur s’ouvre à lui, que ce qu’il croyait figé, immuable peut être bouleversé. Que les mots de liberté, égalité, fraternité  ne sont pas vides de sens. Qu’une société peut se fonder sur eux. Il comprend aussi que toute réforme nécessite des hommes prêts à retrousser leurs manches, à s’engager, à oser risquer leur vie pour leurs idéaux. Il entrevoit alors que toute réforme ne perdure que par le soutien renouvelé de volontés individuelles. La vie peut avoir un sens si elle a pour finalité la liberté, l’égalité et la fraternité. La déclaration des droits de l’homme scelle à jamais cette promesse.

Aux hommes de la réaliser !

La Révolution française constitue le point d’orgue de l’histoire en septième classe (13 ans). La Renaissance et ses découvertes fondamentales, le schisme de l’Eglise, la monarchie absolue, le siècle des lumières en forment les soubassements. A la question sur la finalité de la vie et sur la mort que tout un chacun se pose, mais surtout l’adolescent, la réponse viendra, paradoxalement, de la révolution industrielle et technologique dans laquelle nous sommes immergés aujourd’hui !

A l’instar de la révolution française, la révolution industrielle va accoucher d’un monde nouveau, un monde aux réalités impensables il y a encore deux siècles. En quelques décennies, les inventions majeures qui forment son socle sont découvertes : machines à vapeur, moteur à explosion, électricité, téléphone, radio…

Leurs applications tant industrielles que domestiques suivent dans leurs foulées.

Grâce à elles, l’homme pour la première fois de son histoire est libéré des efforts physiques, de toute servitude physique. Les forces contenues dans la vapeur, le pétrole, l’électricité, l’atome… sont gigantesques. Grâce à elles tout devient possible. Grâce à elles les distances sont raccourcies, le travail s’est mécanisé, la production de biens de toutes sortes à très faible coût est rendue possible. Grâce à elles la société de consommation peut s’imposer. Parallèlement l’homme quitte sa campagne séculaire pour la ville trépidante où de nouvelles valeurs sont cultivées : l’agent, le confort, les biens matériels, le temps libre, l’individualisme, la réussite sociale…

Tout s’accélère. L’instantanéité s’impose. Tout doit être vécu, acheté, jeté au plus vite. Le bonheur se mesure sur l’échelle du pouvoir d’achat. Plus l’homme possède, plus il est « heureux ». La révolution industrielle a bien donné naissance à la société de consommation. Celle-ci, pour contenter tout le monde, pille, pollue, désertifie, extermine la terre. Qu’importe ! La société du « toujours plus » refuse de se remettre en cause, elle impose ses lois au mépris de la nature, de la planète, de l’homme en fin de compte.

Face à cette débauche suicidaire, des hommes se dressent, des hommes lucides et conscients, des hommes animés d’idéaux et de convictions. Face au marchandage généralisé, ils opposent le don de soi, face à la réussite qu’octroie l’argent, l’intérêt et le bien-être du nécessiteux, face au nivellement généralisé, le particularisme, face aux illusions matérialistes, les valeurs basées sur le respect de la vie. Ces hommes et ces femmes s’appellent Gandhi, Martin Luther King, Albert Schweitzer, l’abbé Pierre, sœur Theresa, Simone Weil, Albert jacquard, Théodore Monod, Jean-Marie Pelt… et une multitude d’autres bien entendu. Grâce à leurs appels, à leurs témoignages et à leurs actions concrètes, la société d’aujourd’hui ne sombre pas dans la décadence du « toujours plus ». Grâce à eux, des petites lumières d’humanité brillent ici ou là, grâce à eux, de vrais visages humains émergent de la foule, grâce à eux la vie prend un sens.

L’adolescent est friand de ces vécus et témoignages. Il perçoit dans ces personnages d’exception, le rayonnement du « moi » qui les habite. D’un moi affirmé, mûr. Il comprend que ces hommes et ces femmes ont su résister aux sirènes du paraître et de l’éphémère, ont su cultiver en eux leur authenticité, leur vérité. Ils ont su surmonter les doutes, les attaques, la solitude, proclamer haut et fort leurs messages d’éternité, être eux-mêmes !

Ils incarnent la réponse à la question du sens de la vie et de la mort. Ils ont su cultiver et développer l’Homme en l’homme, ou comme le dit si bien Antoine de Saint-Exupéry « faire naître l’Homme dans le petit homme ».

En se hissant à l’Homme, l’homme délaisse l’éphémère pour l’éternel, de créature il devient créateur. C’est la réponse qu’attend tout jeune entre douze et quinze ans. Aux adultes de savoir la lui offrir.

Article rédigé par Guy Chaudon, enseignant dans les écoles Steiner Waldorf.
Article publié initialement dans la revue 1.2.3 Soleil de l’APAPS

Mis en ligne le 27 Décembre 2016

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